L’artiste béninois Roméo Mivekannin revisite les images coloniales et les chefs-d’œuvre de l’art occidental pour mieux dénoncer les stéréotypes.
Béninois, Roméo Mivekannin grandit en Afrique avant d’arriver en France à 18 ans pour poursuivre ses études. Après une formation en ébénisterie, il s’oriente vers l’architecture et obtient son diplôme en 2015. C’est alors qu’il se lance dans une thèse sur l’« Afrique postcoloniale, mémoire et photographie », centrée sur le Bénin. Parallèlement, il commence en autodidacte un travail de peinture. Posant le principe de son œuvre, que l’on peut découvrir dans l’exposition du Louvre-Lens, il reprend, sur de grandes toiles, la composition d’ensemble des photographies coloniales, substituant de-ci de-là son propre visage à celui des personnages.
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Pénétrant comme par effraction dans ces images, Roméo Mivekannin dénonce, non sans humour, les stéréotypes coloniaux. En 2020, il s’attaque au vaste corpus des chefs-d’œuvre de l’histoire de l’art occidentale, introduisant la couleur dans son travail. L’exposition du Louvre-Lens réunit un ensemble important de ces « copies libres » où l’artiste prête ses propres traits aux protagonistes, masculins ou féminins.
Comme dans un « jeu des sept erreurs », il apparaît successivement dans La Mort de Sardanapale (d’après Delacroix), Le Radeau de La Méduse (d’après Géricault) ou le Couronnement de Marie de Médicis (d’après Rubens), n’hésitant pas à incarner le cardinal de Richelieu (d’après Philippe de Champaigne) ou les riches bourgeois de Rembrandt. Patchwork de tissus récupérés, les toiles qui lui servent de support sont au préalable plongées dans des décoctions de plantes selon des rituels vaudous, introduisant la dimension de l’exorcisme.
Pour son exposition à la Collezione Maramotti, Roméo Mivekannin a produit un nouveau corpus, travaillant sur un tissu de velours noir très profond d’où les figures, inspirées du Caravage comme du cinéma italien de Pasolini, semblent émerger d’une nuit profonde.
1986
Naissance de Roméo Mivekannin à Bouaké, Côte d’Ivoire.
2020
« Dans la tête c’est Mexico », exposition à la galerie Éric Dupont, Paris.
2021
Contribution à « Zoo Humain : Au temps des exhibitions coloniales », à l’AfricaMuseum de Tervuren, Belgique.
2022
« Ce que le monde doit à la nuit », à la galerie Cécile Fakhoury, Paris. Participe à la Biennale de Dakar.
2023
Expositions « Une autre histoire du monde » au Mucem, Marseille, et « Senghor et les arts : Réinventer l’universel » au musée du Quai Branly-Jacques Chirac, Paris. Participe à la Biennale de Sharjah, aux Émirats Arabes Unis.
2024
Exposition « Révélation ! Art contemporain du Bénin » à La Conciergerie, Paris.
« Roméo Mivekannin, l’envers du temps », Louvre-Lens, 99, rue Paul-Bert, 62300 Lens, du 5 décembre au 2 juin
« Black Mirror, Roméo Mivekannin », Collezione Maramotti, via Fratelli Cervi 66, 42124 Reggio Emilia, Italie, du 9 mars au 27 juillet
« When We See Us : Un siècle de peinture figurative panafricaine », Bozar, palais des Beaux-Arts de Bruxelles, 23, rue Ravenstein, Bruxelles, du 7 février au 10 août
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